La Station Spatiale Internationale

support évolutif d'une politique versatile

Comment en est-on arrivé là ?

Au début de l'année 1981, quand Ronald Reagan est élu président des USA, les relations avec l'URSS ne sont pas très bonnes. Reagan envisage de lancer un nouveau programme de prestige, un peu dans la lignée du programme Appolo qui conduisit naguère quelques états-uniens à fouler du pied le sol lunaire. Parmi les différents projets en lice, le choix se porta finalement sur une "grande" station spatiale. Ce projet porta d'abord le nom de Freedom car il était le symbole du camp de la liberté (CIA, Opus Dei, Vatican) contre les forces du mal représentées, à l'époque, par le communisme.

Après le second mandat de Reagan, la tension entre USA et URSS est retombée et la station spatiale est alors renommée Alpha, un nom moins agressif. Tout comme alpha est la première lettre de l'alphabet (grec), cette station serait la première d'une série que certains visionnaires envisageaient déjà. Un premier tour de force consista à embarquer les soviétiques (ne devrait-on dire les URSSiens ?) dans une coopération sur ce projet. Ceux-ci avaient déjà acquis la pratique des stations spatiales avec leurs programmes Saliut et Mir, les USA allaient ainsi avoir accès à ce savoir faire. De plus le coût de ce projet étant astronomique, il était bienvenu que les soviétiques en prennent une partie à leur charge. Cela étant d'autant plus bénéfique que les budgets qu'ils y consacreraient affaibliraient d'autant ceux qu'ils consacreraient à la modernisation de leur système vieillissant d'armes ballistiques intercontinentales. Les USA, désormais seule superpuissance, assureraient ainsi leur hégémonie mondiale.

Sous la présidence de William Clinton, la fameuse station n'a même plus de nom. Comme il est difficile de parler de quelque chose qui n'a pas de nom, les diverses publications désignaient la chose simplement par ISS (International Space Station). Ce n'est pas compromettant, ça ne dit rien sur les buts poursuivis et cela laisse la porte ouverte à tous les revirements politiques possibles (voire certains).

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En dehors du fait que maintenir à grands frais des habitacles avec un personnel restraint à quelques 350 km du sol ne passionne pas les foules, on peut se poser des questions quant à la cohérence du projet. Le mariage de la technologie soviétique (vaisseau Progress, normes du système métrique international) avec la technologie états-unienne (navette spatiale, unités de mesure ancestrales) ressemble for à celui de la carpe et du lapin. Il en résulta des difficultés qui, pour ne pas être insurmontables, contribuèrent à faire enfler le coût du financement jusqu'au chiffre record de 100 milliards de dollars (1011 $). Un tel chiffre ne dit évidemment rien au vulgum pecus, mais essayez de calculer ce que cela représente pour chaque contribuable. Simplement avec la méthode du doigt mouillé, je subodore que c'est plus que le fiasco du Crédit Lyonnais et la faillite de la banque Ambrosiano réunis.

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C'est là qu'intervient le second tour de force des USA, réussir à convaincre, sous prétexte de science et de recherche, l'Europe, le Japon et le Canada de participer financièrement à cette aventure en échange d'un strapontin sur la dite ISS. Pensant accéder ainsi aux moyens de faire de la science sur une une station spatiale qui, pour chacun agissant seul, n'était pas à leur portée, ces pays se lancèrent dans ce partenariat. Les européens ont produit le coûteux laboratoire Colombus et les Japonais le laboratoire Kibo, lui aussi d'un coût considérable. Autant de fonds qui ont été soustraits à la recherche fondamentale. Il ne semble pas que les quelques "bricolages" et germination de graines, effectués à bord, doivent un jour conduire à l'attribution de quelque prix Nobel. De plus, par suite des chocs et vibrations qui agrémentent la vie de tous les jours sur l'ISS, ce lieu est vraiment mal choisi pour faire des expériences en microgravité, une simple capsule en orbite constitue une plateforme beaucoup plus stable. Seule la recherche à caractère médical pourrait finalement s'avérer profitable, les astronautes (mais oui, la Terre est aussi un astre) constituant eux-mêmes, dans ce cas, le sujet d'expérience.

Colombus et Kibo devant être mis en place très prochainement, la recherche proprement dite va enfin pouvoir commencer, avec des espaces de travail raisonnables et des équipements performants, 11 ans (seulement) après le lancement du premier module. Toutefois, dès 2004, les USA, par la voix de leur président G.W. Bush, ont fait savoir qu'il était opportun est urgent qu'ils retournent sur la lune. C'est une question de prestige car les chinois pourraient bien les devancer et cela ne serait pas bon pour l'image de leader à laquelle les USA sont très attachés et qu'ils ont "vocation" (divine, in God we trust) à maintenir. Pour cela ils souhaitent que toute la recherche conduite sur l'ISS soit désormais orientée prioritairement vers les projets lunaires, puis interplanétaires vers Mars.

C'est ainsi qu'après avoir fait financer une bonne partie de l'opération ISS par leur amis, alliés, partenaires, ils sont prêts à en tirer parti prioritairement pour servir leur propres ambitions. Les "partenaires" réalisant qu'ils se sont quelque peu faits piéger se posent maintenant des questions à propos de la confiance à accorder aux USA dans une collaboration éventuelle sur de nouveaux projets. Il faut savoir qu'un partenariat avec les USA est toujours du type gagnant-gagnant : USA gagnant d'abord - USA gagnant toujours. L'Histoire montre qu'il en a toujours été ainsi, mais les politiques ont la mémoire courte.

-- rleb, Janvier 2008

Lors d'une audition du sous-comité à l'Espace et à l'Aéronautique de la chambre des représentants le jeudi 24 Avril 2008, le congressman Nick Lampson a rappelé que le vol de l'AMS (Alpha-Magnetic Spectrometer) représentait un engagement de la NASA et que son abandon desservirait la réputation des Etats-Unis. Bill Gersteinmaier, responsable des opérations spatiales à la NASA a confirmé que le planning des vols de navettes restants ne permettait aucune occasion de faire voler AMS et qu'une telle exprience,[...], ne pouvait être introduite dans les plans de la station. Rappelons que AMS est le fruit d'une collaboration scientifique de 16 pays et devait ĂȘtre embarqué sur une navette pour rejoindre l'ISS.

-- d'après Radio REF, Juin 2008

Bibliographie

Ciel et Espace, Janvier 2008

Sur le web :

Pour tout savoir sur l'ISS (à l'exception des aspects politiques) http://www.obsat.com/iss.htm

    
File: iss.html, 2008-01-01 - Robert L.E. Billon - Last update: 2010-11-28