Le vol humain (1)

(1) Si on veut paraître savant (ou pédant) on dira
man powered flight, mais ça revient au même.

Avant-propos

L'espèce humaine (homo sapiens) est normalement dépourvue d'ailes ainsi que de tout ce qui pourrait ressembler à un plumage. Soit qu'elle n'en a jamais été pourvue, soit qu'elle les ai perdues au cours de son évolution. Par contre, elle a toujours rêvé de pouvoir voler, et ceci depuis la plus haute antiquité, donnant lieu à des récits mythiques, épiques ou amusants. Voyons ci-après quelques unes des tentatives les plus remarquables.

Premier vol connu, premier accident aérien !

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Minos, roi légendaire de Crète, ayant appris que Dédale avait aidé Pasiphaé à s'unir au taureau blanc de Poséidon (2) il l'enferma dans le labyrinthe avec son fils Icare mais Pasiphaé les libéra tous les deux. Il leur restait à mais ce n'était pas facile de s'échapper de Crète car Minos faisait garder par des soldats tous ses navires et offrait une récompense de 50.000 dollars à qui capturerait Dédale.

Alors celui-ci se fabriqua une paire d'ailes pour lui et une pour Icare, les grandes plumes étaient cousues mais les petites plumes étaient fixées avec de la cire. Soucieux de la sécurité en vol, il recommanda bien : "Mon fils, prends garde, ne vole pas trop haut car le soleil ferait fondre la cire, ni trop bas, car les plumes seraient mouillées par les embruns de la mer". Ils progressaient à bonne allure, ils venaient de laisser derrière eux Naxos, Délos et Paros sur la gauche, et dépassaient maintenant Lébynthos et Calymnos sur la droite, c'est alors que Icare, trop heureux de sentir ses grandes ailes le porter facilement, enfreignit les conseils de son père, prit rapidement de l'altitude et s'éleva vers le soleil.

A un moment, Dédale se retourna et ne vit plus Icare, mais sur la mer au-dessous de lui, des plumes flottaient sur les vagues. La chaleur du soleil avait fait fondre la cire (2), Icare avait chut et s'était noyé. C'est ainsi que cette première tentative connue de vol venait, si l'on peut dire, de tomber à l'eau par suite d'une faute de pilotage.


(2) Dieu grec, dieu de l'eau puis dieu de la mer, aussi appelé Neptune par les romains. Il faut dire que les grecs avaient une religion avec un panthéon imposant comprenant de nombreux dieux, ainsi chacun pouvait y trouver un dieu à son goût. Les romains continuèrent quelque temps cette amusante coutume, laquelle disparut avec l'avènement du monothéiste Constantin. On a plus rien fait d'équivalent depuis.

(3) Au XXIe siècle on a guère progressé, ce n'est plus la cire qui fond mais les tubes de Pitot qui givrent.

Léonard de Vinci, un génial inventeur

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Leonardo da Vinci (Vinci 1452 - Amboise 1519), peintre, sculpteur, orfèvre, musicien, architecte, physicien, astronome, savant, géologue, géomètre, anatomiste, botaniste, alchimiste, inventeur visionnaire, ingénieur militaire, horloger, urbaniste, et homme de science, à la fois artiste, scientifique, inventeur et philosophe humaniste, Léonard incarne l’esprit universaliste de la Renaissance dont il fut un des symboles majeurs et demeure l’un des plus grands hommes de cette époque.

Il fut particulièrement prolifique durant période 1485-1500. La plupart de ses projets étaient dérivés, par déduction, de l'observation de la nature. Pour ce qui concerne le domaine du vol, il inventa le deltaplane (apparemment inspiré de la chauve-souris), l'hélicoptère et le parachute. Les deux premiers ne volèrent jamais car trop lourds pour être actionnés par l'homme, quant au parachute, il resta sans objet. En effet le parachute est à l'avion ce que l'issue de secours est à la salle de spectacle, donc point d'avion, point besoin de parachute (4). Il fallu attendre le XXe siècle et la disponibilité du moteur thermique pour faire voler des machines basées sur les principes qu'avait élaborés Léonard. Il s'agit en effet de faire voler du plus lourd que l'air et pour cela il semble bien la puissance développée par un humain soit insuffisante. Ce sont Clément Ader (entre 1874 et 1897) et les frères Orville et Wilbur Wright (vers 1903) qui firent les premiers pas, si l'on peut dire, mais là nous sortons du domaine du man powered flight.

Par ailleurs ces machines révolutionnaires restèrent non pas au sol, mais dans les cartons car Leonardo n'obtint pas les budgets pour les construire (5). Ainsi il ne vola jamais, et c'est tant mieux, cela lui permit de vivre suffisamment longtemps pour exercer son génie durablement et nous faire bénéficier de ses oeuvres remarquables dans les domaines les plus variés.

(4) ,Ce que François Rabelais aurait pu résumer par une simple phrase : "A moins que d'avoir chié, point n'est besoin de torcher cul".

(5) Ah... s'il avait osé proposer un porte-avions nucléaire ! Peut-être eut-il été entendu ?

Le vol sans ailes

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Ce fût probablement les progrès de la physique, et particulièrement en dynamique des gaz, qui incitèrent les frères Joseph (1740-1810) et Etienne (1745-1799) Montgolfier, fils d'un papetier de Vidalon-lès-Annonay (07) à gonfler des ballons de papier avec de l'air chaud.

Le premier ballon opérationnel, appelé aérostat, a une forme ovoïde, 13 mètres de diamètre, 21 mètres de haut pour un volume de 2 200 m3 et une masse de 500 kg. Il est terminé dans les environs du 8 octobre 1783. Le 12 octobre, les essais en captif commencent, d'abord sans passager, son père ayant rigoureusement interdit à Etienne de s'aventurer sur cette étrange machine. Néanmoins ce premier test est "habité" par un coq, un canard et un mouton. Les essais suivants ont lieu le 15 (montée à 26 mètres, durée 4 minutes et 25 secondes), ainsi que le 17. Le chauffage de l'air est obtenu en brûlant de la paille sèche (6). C'est le physico-chimiste Jean-François Pilâtre de Rozier (Metz 1754 - Wimereux 1785) qui joue le rôle de chauffeur.

Le premier vrai vol libre, avec passagers, a lieu le 21 novembre 1783 à Paris, Pilâtre de Rozier et le marquis d'Arlandes ayant pris place dans la nacelle. Partis des jardins de La Muette (actuel 16e arrondissement, à l'ouest de Paris), à la lisière du Bois de Boulogne. Le ballon qui pèse environ 850 kg s'élève rapidement. Il file vers Paris, et c'est au-dessus des Tuileries qu'ils atteint l'altitude maximale : 1 000 mètres. Puis il commence à perdre de l'altitude en quittant Paris par la porte d'Italie. Ils atterrissent finalement sur la Butte aux Cailles, aujourd'hui place Verlaine, dans le 13e arrondissement, au sud-est de la capitale. La distance de neuf kilomètres est parcourue en vingt-cinq minutes, soit une moyenne horaire de 21,6 Km/h.

On donna par la suite le nom de montgolfière à ce genre de ballons gonflés à l'air chaud, pour rappeler le nom des deux frères qui les ont imaginé. De nos jours, au cours de certaines fètes, des ascencions en mongolfière sont parfois proposées au public. Le chauffage au gaz s'est définitivement imposé.

(6) À l'époque on ne sait pas encore la transformer en pétrole.

L'avènement du deltaplane

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La puissance développée par un humain ayant été reconnue insuffisante pour voler comme l'oiseau, on imagina, plus modestement, de planer. Cette idée fut mise en pratique par l'ingénieur civil allemand Otto Lilienthal (Anklam 1848 - Berlin 1896). Il est considéré comme le précurseur du vol à voile et l'inventeur du deltaplane moderne.Ses recherches sur la forme des ailes lui permirent de démontrer scientifiquement les capacité de portance de l'extrados de l'aile.

Il effectua entre 1891 et 1896 deux mille vols planés attestés, depuis une colline artificielle à proximité de Berlin. Il construisit 16 machines, à faible allongement, qui étaient plus proches des deltaplanes pendulaires de notre époque que du planeur de performance. La voilure des planeurs était réalisée à partir d'une structure en bois de saule entoilée de coton. La surface portante variait de 10 à 20 m2. En se lançant du haut d'une colline haute d'environ vingt mètres, il pouvait planer jusqu'à 300 mètres dans les meilleures conditions. Le contrôle de la machine se faisait par des déplacements du corps comme pour les deltaplanes pendulaires contemporains. Sous l'effet d'une rafale, il fit une chute fatale le 9 août 1896. Ses dernières parole s: "Il faut parfois consentir à de petits sacrifices".(7)

(7) Les informations de ce paragraphe sont tirées de Wikipédia, la photo ci-dessus est consevée au Lilienthal Museum et publiée sur internet (http://www.lilienthal-museum.de/olma/intro.htm).

Le retour des plumes

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Depuis Dédale et Icare, plus personne n'avait utilisé les plumes. Cette très ancienne pratique fût cependant remise au goût du jour par Renée Marcelle Jeanmaire, connue sous le nom de scène de Zizi Jeanmaire. Née en 1924, à Paris, elle est danseuse de ballet, chanteuse, meneuse de revue et actrice. Elle travaille d'abord à l'Opéra de Paris comme danseuse classique, avant de réorienter le cours de sa carrière en 1954 en se consacrant au music-hall. Les mauvaises langues prétendent que son "truc en plume" ne lui permit jamais de voler très haut.


Autres légendes

Il existe d'autres récits relatifs à des "hommes volants" dont on ne sait s'ils appartiennent à l'histoire ou à la légende. On en trouve un exemple en suivant les liens ci-dessous.

Hezarfen Ahmet Celebi (en anglais)
Hezarfen Ahmet Celebi (en français)
    
File: glloq.html, 2009-08-25 - Robert L.E. Billon - Last update: 2010-11-19